Introduction

Fin août marque l’anniversaire de ma conversion à l’islam et de mon cheminement spirituel. En août 2012, je me suis rendue à Bruxelles avec deux amies, dans une petite mosquée, pour prononcer l’attestation de foi lors d’un cours de religion islamique. L’émotion était très forte, et je me souviens encore de la joie d’avoir enfin franchi ce cap après une année de réflexion. J’étais devenue musulmane, mais que signifie réellement ce choix, et qu’en ai-je fait douze ans plus tard ?

J’ai décidé de revenir sur ma conversion à l’islam, douze ans après, en vous partageant mon long cheminement. Bien que j’aime les détails, il est évident que je ne pourrais pas tout retracer. Je précise que je partage ici mon expérience personnelle, en abordant mes ressentis et mes émotions. Chacun est libre de prendre ce qui résonne en lui et de laisser ce qui ne lui parle pas. Je parle de mes croyances et de ma vision du monde, tout en prenant du recul avec mon regard de coach pour expliquer ce qui s’est passé en moi. Je tiens à rappeler que chacun est libre de croire ce qu’il veut.

Après la publication de mon article et de ma vidéo YouTube « Ma conversion à l’islam en 6 étapes« , j’ai reçu de nombreux commentaires sur ce que signifie être une bonne musulmane. Il est vrai que je n’avais pas tout de suite compris les propos de certaines personnes, et que je n’avais pas partagé l’évolution de ma pensée au fil des années. Il est donc grand temps pour moi de m’exprimer sur ce sujet qui me tient particulièrement à cœur, de partager les dérives que j’ai pu observer, ainsi que la sagesse que j’en ai tirée. Si cela peut aider et guider d’autres personnes vers leur propre voix intérieure, tant mieux !

Le début de mon cheminement spirituel

Pour comprendre le fil de l’histoire, reprenons les choses dans l’ordre chronologique. Petite, j’ai été baptisée, j’ai suivi des cours de christianisme et fait mes communions, mais, pour être honnête, je n’y comprenais pas grand-chose. C’était avant tout culturel, car nous n’allions pas à la messe tous les dimanches. En grandissant, les occasions d’être en contact avec des institutions religieuses étaient rares. Dans ma famille, nous ne parlions jamais de Dieu. Je savais à peine que mes grands-parents maternels s’étaient convertis au bouddhisme, tandis que mon grand-père paternel, lui, se rendait régulièrement à l’église.

Je me souviens qu’à l’âge de 13 ou 14 ans, après avoir changé d’école, je me suis retrouvée entourée de personnes aux origines et croyances diverses. J’ai commencé à interroger mes camarades pour en savoir plus sur les différentes religions. Je voulais déjà comprendre ce qu’elles représentaient et me sentir intégrée dans une communauté.

Découverte et conversion à l’Islam

2010

Vers 18 ans, je me suis liée d’amitié avec plusieurs musulmans, et l’une de mes amies, très patiente, a répondu à mes nombreuses questions et m’a prêté de nombreux livres. Mon grand-père maternel, qui possédait un Coran, me l’a offert. Au fil de mes lectures, une flamme a commencé à grandir en moi. J’étais profondément attirée par tout ce que je découvrais, au point qu’un jour, j’ai dit à ma mère : ‘Maman, j’ai trouvé. J’ai enfin trouvé en quoi je crois !’ Avec le recul, je trouve ça plutôt mignon.

Finalement, aux alentours de mes 20 ans, j’ai pris la décision de franchir le pas et de me convertir officiellement à l’islam. Toutes les étapes de ce parcours sont décrites dans « cet article ». Elles sont cruciales, et il est important de valider les émotions ressenties à ce moment-là, car cela n’a pas toujours été facile.

2012

Ma quête de sens semblait enfin être comblée. J’avais le sentiment d’appartenir à un groupe et d’être reconnue. À cette époque, j’étais en couple avec un musulman, et je m’imaginais me marier et fonder une famille en suivant les préceptes de l’islam. Animée par le désir de bien faire, j’ai entrepris de tout changer du jour au lendemain, en commençant à pratiquer le jeûne, la prière, et d’autres aspects de la foi.

Je me souviens que mon oncle avait dit : ‘Ça va lui passer !’ Sur le moment, j’ai très mal pris cette remarque. J’avais fait un choix difficile, qui bouleversait ma vie, et je me sentais incomprise et rejetée par ma propre famille. Cette réaction ravivait une blessure profonde, qui ne cessait de se répéter. Pour combler ce vide, je me suis encore plus réfugiée dans la communauté musulmane, où je me sentais acceptée.

Le porte du voile et les nouveaux défis de ma conversion à l’Islam

2015

Après un appel intérieur puissant et un voyage aux États-Unis, j’ai pris la décision de porter le voile. Ce fut un deuxième moment très difficile. Cette décision n’a pas été bien reçue par ma famille, ce qui m’a encore davantage éloignée des personnes qui n’acceptaient pas ce changement. Cependant, paradoxalement, je me sentais de mieux en mieux à cette époque.

Il y avait en moi une part qui, je pense, cherchait encore plus à affirmer ma place dans la communauté musulmane. Toujours motivée par le désir de bien faire et de progresser selon les préceptes de la religion, j’ai pris la décision de quitter le musulman avec qui j’étais en couple, car il n’était pas prêt à avancer sur le même chemin que moi, celui du mariage. La question du mariage est un vrai défi pour beaucoup, un sujet qui mériterait d’ailleurs un article à part entière !

Mettre fin à une relation qui fonctionnait a été extrêmement difficile pour moi, au point de me plonger dans la dépression. Avec le recul, je crois aujourd’hui que j’avais besoin de traverser cette épreuve, car tous ces événements ont contribué à faire de moi la personne que je suis aujourd’hui.

Crise personnelle et relationnelle

2016

Je me suis perdue dans la tristesse, d’abord dans le déni, avec pour seul objectif de trouver un mari. À cette époque, je voyais le mariage comme une finalité, une manière de construire ma vie. La blessure du rejet refaisait surface. Je me suis alors réfugiée dans la religion, mais celle-ci ne suffisait pas à me nourrir intérieurement. J’ai recommencé à boire de l’alcool à quelques reprises, une habitude que j’avais abandonnée depuis des années, et je me suis inscrite sur des applications de rencontre.

C’est à ce moment-là que j’ai repris contact avec un ancien ami, qui m’a annoncé qu’il s’était lui aussi converti à l’islam. Il avait changé, n’était plus la personne que l’on connaissait pour sa mauvaise réputation et son séjour en prison. J’explique toute cette histoire en détail dans mon livre « Violences Conjugales : comprendre l’emprise pour s’en libérer« . C’est là que la manipulation a commencé. Il a réussi à me manipuler en utilisant la religion comme levier.

Je suis entrée dans une relation de violences conjugales. Lors des attentats de Bruxelles, il m’a demandé d’enlever mon voile. Bien que cela ne m’arrangeait pas de revenir sur mon choix, je ne supportais plus le regard extérieur sur moi. Ce n’est que plus tard que j’ai compris que cette demande était une façon de me contrôler, car il critiquait constamment ma façon de m’habiller et cherchait à tout contrôler dans ma vie.

Renaissance et réflexions sur mon cheminement spirituel

2018

Ma relation marquée par des violences conjugales prend fin. Après plusieurs tentatives de partir, j’ai finalement déposé plainte à la police. Ce tournant majeur dans ma vie m’a poussée à me reconnecter à la religion. Ma foi a été un soutien essentiel pour m’en sortir. J’ai commencé à lire le Coran en entier, à pratiquer toutes les prières et à observer le jeûne du Ramadan. En parallèle, j’ai ressenti le besoin de mieux comprendre le monde, l’histoire, et les religions. J’ai donc pris du temps pour moi, entamé une thérapie profonde, et mis l’accent sur mon bien-être.

Au cours de ce retour à moi-même, j’ai rencontré un autre homme. Bien que je me sois initialement refusée à toute relation, car il n’était pas musulman et que j’avais un billet sans retour pour Miami, j’ai finalement choisi d’écouter mon cœur plutôt que la religion. Aujourd’hui, c’est mon fiancé, nous avons un enfant, un chat, une maison, et nous sommes très heureux ensemble.

Ce choix d’écouter mon cœur a marqué une rupture entre la communauté musulmane et moi-même. J’ai décidé de tenter une histoire avec cet homme, car je savais qu’il avait foi en la vie et l’univers, même s’il ne se rattachait pas à une religion, ce qui, à ce moment-là, primait pour moi.

2019-2020

Je continue à pratiquer ma foi, même en étant en couple avec mon compagnon. Nous vivons à Bruxelles, où la communauté musulmane est encore très présente, mais je me sens de moins en moins rattachée à celle-ci. Je prends de plus en plus confiance en moi, je continue à lire, à m’instruire, et à poursuivre mon cheminement personnel. Ma foi s’approfondit.

Cependant, les ombres de mon passé refont surface lorsque mon ex-partenaire, cherchant à me nuire, me dénonce aux services antiterroristes. Heureusement, l’enquête se termine rapidement, et il s’avère qu’ils n’ont rien contre moi.

Changement de vie et scission avec la communauté musulmane

2021

Notre départ pour l’Espagne, avec mon fiancé qui n’était pas musulman, marque un nouveau tournant majeur dans ma vie. Ce choix a été mal perçu par ma communauté, ce qui a conduit à une rupture profonde avec elle ainsi qu’avec les personnes avec qui j’avais tissé des liens. Je me rends compte que nos visions du monde ne sont plus alignées. Une fois de plus, je me sens rejetée et incomprise. J’ai réalisé que cette blessure du rejet était un aspect de moi-même sur lequel je devais vraiment travailler. J’ai donc pris du temps pour moi, et ce fut le dernier Ramadan que j’ai pratiqué.

2022

En 2022, mes lectures prennent une tournure de plus en plus spirituelle. Je découvre le livre Self Islam, qui ouvre encore davantage mon esprit. Je sens ma foi grandir, mais je commence aussi à remettre en question certaines certitudes que j’avais sur l’islam. Bien que j’aie longtemps cru que c’était LA vérité, je commence à ressentir des tensions internes. Je réalise que ma relation avec Dieu semblait toujours médiée par des hommes, ce qui me pousse à redéfinir mes fondements spirituels et mes croyances, en les dissociant des cadres religieux traditionnels.

Je me plonge dans la compréhension des dynamiques de manipulation, d’abord dans le cadre du couple, puis au sein des groupes. Ce processus m’aide à discerner ce qui se joue en moi et ce qui se joue dans la société. Cette année est également marquée par un travail intérieur profond et la naissance de mon enfant. L’expérience de l’accouchement m’a permis de ressentir intensément ce qu’est être dans un vortex entre la vie et la mort.

Une évolution continue sur mon cheminement spirituel

2023

Ma vision de la vie évolue encore, en grande partie grâce à mon rôle de mère. Devenir maman transforme profondément nos croyances et notre construction intérieure de ce qu’est la vie.

2024

Tout s’accélère pour moi. Je commence à distinguer les récits et les vérités souvent cachées sur le monde. Je réalise que les écrits sacrés ne sont pas seulement des textes religieux, mais un miroir de notre monde intérieur. Par exemple, les figures féminines représentent le féminin, la lune, les émotions, l’introspection, tandis que les figures masculines symbolisent le soleil, le masculin, l’action, et l’extérieur. J’ai beaucoup lu sur la spiritualité au fil des ans, et bien que j’avais une compréhension intellectuelle de ces concepts, c’est seulement maintenant que je saisis leur véritable sens, avec une clarté et une légèreté nouvelles.

J’ai compris que les religions sont souvent fondées sur la peur du jugement, véhiculant l’image d’un Dieu perçu comme un père jugeant. En m’affranchissant de cette vision, je me suis reconnectée à l’amour et à la légèreté de l’existence. J’ai appris à devenir souveraine de ma vie, à faire des choix en pleine conscience, et à améliorer encore plus mon hygiène de vie.

J’ai également été profondément marquée par le livre Humanité, qui explore la bonté innée des êtres humains et explique comment la hiérarchie et les États ont influencé l’humanité. Ce livre m’a ouvert les yeux sur la manière dont les religions peuvent exercer un certain pouvoir sur les gens.

Conclusion

Ma foi, quant à elle, n’a jamais faibli. Au contraire, elle a grandi, évoluant vers quelque chose de plus vaste et plus grandiose que ce que l’on raconte et que ce que je percevais auparavant. Une foi en quelque chose d’illimité, de bienveillant, qui dépasse les simples notions de bien et de mal. Mon cheminement n’est pas terminé ; je continue à expérimenter la vie, à apprendre, et à construire ma propre pensée.

J’espère que ce sujet vous a plu et vous inspirera. Dites-moi dans les commentaires si cela vous fait écho !

Photos : Pexels